On assiste à l’irruption au centre des préoccupations publiques des menaces et des risques anciens et nouveaux : conflits de haute intensité, guerres asymétriques, terrorisme international, cybersécurité, sécurité climatique face aux catastrophes naturelles, crises sanitaires internationales et sécurité en approvisionnement des médicaments et vaccins, crime organisé et réseaux mafieux à l’efficacité renforcée grâce aux nouvelles technologies et à l’effacement progressif des frontières nationales, liste qui n’ a rien d’exhaustif.
Cette nouvelle donne a conduit les États occidentaux à repenser leur sécurité en des termes plus globaux – associant problématiques de sécurité intérieure et enjeux stratégiques internationaux – et, par voie de conséquence, à réorganiser leurs architectures nationales de sécurité pour en tenir compte.
L’IHEDN a depuis un certain temps étendu son champ de réflexion au-delà de la défense militaire pour se pencher sur la défense et la sécurité au sens global, à preuve les sessions économiques et cyber, à preuve aussi au sein de l’UNION-IHEDN le récent Groupe Santé qui a vu le jour suite à la crise sanitaire.
Mais l’aspect géopolitique demeure fondamental : quelle place pour l’Europe sur l’échiquier politique face aux États-Unis, à la Chine et la Russie dans un monde, où pour reprendre les analyses de Michael Doyle, de l’Université de Columbia, un certain nombre de puissance, après le 11 septembre, dans le monde sont tombées dans ce qu’il appelle les pièges de Thucydide, le grand historien grec de la Guerre du Péloponnèse ?
Ce piège consiste à diviser idéologiquement le monde en deux : aujourd’hui démocratie/droits de l’Homme vs totalitarisme, bref Athènes contre Sparte avec interventionnisme militaire qui mène à la catastrophe (expédition athénienne sur la Sicile, guerres en Irak, Libye, Afghanistan). Athènes a quitté la Sicile, les États-Unis sont partis d’Afghanistan !
Le deuxième piège dénoncé par Thucydide est que dans l’urgence de la lutte contre la totalitarisme, les démocraties, et à l’époque actuelle en premier lieu les États-Unis, se croient obligées d’imiter les autocraties, en restreignant les libertés ou en créant , comme à Guantanamo, des zones de non- droit, voire à s’allier à des États non démocratiques et totalitaires considérés comme alliés dans cette nouvelle guerre froide qui n’oppose plus le Nord contre le Sud ni le capitalisme contre le communisme.
On est entré dans des guerres locales et régionales car le nucléaire empêche une 3 ème guerre mondiale pour favoriser une hyperguerre fondée sur l’espionnage, la cyberguerre et l’ingérence dans les élections des États démocratiques.
On pourrait ainsi envisager différentes thématiques que l’on pourrait résumer en quelques points :
• Sécurité économique et sanitaire : accès aux matières premières, protection des brevets, approvisionnements médicaux, risque informatique….
• Sécurité environnementale : rivages marins, forêts, changement climatique.
• Sécurité politique, défense militaire et défense des valeurs de la République. Cela concerne la sécurité en termes de défense du territoire national, hexagonal et DOM-TOM inclus, les conflits « traditionnels »,de haute intensité, sans oublier le spatial, les migrations (flux et accueil/intégration), la cuture et les droits de l’Homme, la conception même de la Nation, enfin la défense de la francophonie.
En conclusion, on pourra se poser la question de fond :
Où l’Europe et la France peuvent-elles et doivent-elles se situer sur le nouvel échiquier mondial, sachant que la France dispose d’une capacité de projection extraordinaire grâce aux joyaux que constituent les DOM-TOM qui font de la France la deuxième puissance mondiale en terme de surface maritime (ZEE) ?